Lo Hialat
 

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[Lo Hialat]

No. 2
Setémer de 1998

Actualitats

Lo rapport Poignant

Demandat peu purmè ministre francés a Nicole Péry, puish hidat au màger de Kemper, En Poignant, ací lo repòrt Poignant.

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II - La France, le français,

les français, leurs langues et cultures régionales

 

A ) L’Etat-Nation

C’est une histoire sensible, chargée de passions, de tensions et même de violences. La France est un Etat-Nation dont la naissance puise ses racines dans la monarchie, l’empire avant que ne s’installe la République une et indivisible.

Son territoire métropolitain est fait de conquêtes, d’annexions, de guerres, de révolutions, de territoires perdus et reconquis, de mariages monarchiques, etc.

Il se prolonge outre-mer par les territoires issus de la période coloniale et demeurés dans la République.

Dans chaque région concernée, il subsiste des blessures, même si très rares sont les Français qui remettent en cause le principe de l’unité nationale. C’est notre réalité, notre passé. Il ne servirait à rien de chercher à faire de la France une copie de l’Allemagne, de l’Italie, de l’Espagne ou du Royaume Uni. Ce dernier pays ouvre en ce moment de nouvelles pistes avec ses réformes institutionnelles en Ecosse et au Pays de Galles sans oublier l’accord irlandais qui prévoit un chapitre sur la langue. Evidemment, l’extension et l’obligation de la langue française ont été au coeur de la construction de notre pays. Le Français a été souvent la langue du combat républicain, de la devise nationale comme celle de la promotion sociale et de l’égalité des chances. Il a été la langue de la liberté.

Il est vrai que ce développement du français s’est fait au détriment d’autres langues. Il est vrai que l’Etat a appliqué des méthodes qui ont été à l’encontre des réalités linguistiques des populations, de leurs traditions et de leurs cultures aussi.

Encore faut-il regarder sans anachronisme cette période de naissance de l’école républicaine. Le livre de Jean-François Chanet " L’école républicaine et les petites patries " , préfacé par Mona Ozouf, démontre que le premier objectif n’était pas de faire disparaître les langues régionales. Il était de faire apprendre la langue française à tous. Il était de faire de chaque français un républicain, un enfant de 1789. Des forces se sont opposées à cet objectif, notamment dans l’église. La langue parlée par le peuple s’est trouvée au centre de ce combat. Prise en otage, victime de cette bataille essentielle, elle en a fait les frais dans certaines régions. Mais on ne trouve aucune trace de volonté d’anéantir les langues régionales dans les discours de Jules Ferry à la Chambre des Députés. De la même façon, le dictionnaire de l’enseignement primaire de Ferdinand Buisson ne prône pas une telle disparition. Ecrivant cela, il ne s’agit pas de passer sous silence les méthodes d’interdit brutal de pratique de la langue régionale ou certaines déclarations ministérielles de l’époque faites à l’emporte-pièce. Il reste une mémoire de cette période et de ces pratiques dans le conscient ou l’inconscient collectif des populations. Etre puni pour parler sa langue ne peut pas être soutenu.

Mais je suggère de revenir à cet esprit initial et de relire les termes de la circulaire de Jules Ferry du 23 septembre 1880 :

" Pour que l’école se fasse aimer et apprécier de tous, il faut qu’elle s’approprie aux convenances locales, qu’elle se plie aux circonstances et aux traditions, qu’elle joigne à la fixité qu’elle doit garder dans ses caractères essentiels comme institution nationale la souplesse et la variété dans les formes secondaires, sans lesquelles elle cesserait d’être une institution vraiment communale. Aussi convient-il que chaque conseil départemental reste maître d’adopter pour son ressort, sous réserve de la sanction du conseil supérieur, toutes les mesures qui, sans être contraires aux règles communes, lui paraîtront répondre à des besoins particuliers. "

Trente ans plus tard, en octobre 1911, un autre homme politique, Jean Jaurès, restait fidèle à cet esprit :

"Il n’y a pas de meilleur exercice pour l’esprit que les comparaisons (entre la langue occitane et la langue française) ; cette recherche des analogies et des différences en une matière que l’on connaît bien est une des meilleures préparations à l’intelligence ".

Cette histoire s’est accompagnée de la mise en place d’un Etat centralisé au point qu’aujourd’hui, il y a encore une confusion importante dans les mots. Quand on dit " républicain " certains entendent " jacobin ", quand on dit " Etat ", certains entendent " Paris ". Il arrive que la langue française soit associée à cette confusion. Faut-il renier toute cette histoire ? Faut-il s’excuser de son résultat ? Evidemment, a posteriori, il est aisé de dire que d’autres méthodes étaient possibles. Ces méthodes ont été prônées par des maîtres qui les appliquaient aux débuts de l’école publique obligatoire. Ils en ont vite été dissuadés par l’interdiction réglementaire et les rappels à l’ordre permanents des Inspecteurs d’académie. Mais il n’existe pas de machine à remonter le temps, ni d’appareil pour refaire l’histoire !

L’historien Maurice Agulhon a étudié l’évolution de la conscience nationale et de la conscience régionale aux XIXème et XXème siècles. Il a analysé la responsabilité de l’Etat, de la République et de son école dans le déclin ou la disparition des langues régionales. Il lui préfère " la responsabilité de la métamorphose économique récente par laquelle les anciens genres de vie disparaissent et avec eux les faits culturels dont ils étaient le support ". Et il ajoute : " Le discours du régionalisme nationalitaire répartit mal ses coups entre les cibles possibles : trop de coups contre la République, pas assez contre le capital ".

Les valeurs et les réalisations de la République Française sont une fierté pour nous tous. Elles donnent à la France son originalité sur la scène internationale. Elles sont regardées par les pays qui s’éveillent à la démocratie. C’est un idéal auquel les citoyens se réfèrent et s’accrochent dès lors qu’ils constatent des écarts par rapport aux principes qui le sous-tendent. Au début d’un tel rapport, il est primordial d’affirmer que la République est notre bien commun et que la langue française est notre langue commune.

 

B ) L’Etat-Nation et sa diversité linguistique et culturelle

 

Nos langues et cultures régionales sont aussi notre patrimoine commun, une partie du patrimoine de l’humanité. Aujourd’hui, la République ne respecterait pas ses propres principes si elle n’était pas attentive aux demandes, aux attentes, à la vie de ces langues et cultures qui existent sur son territoire, en métropole comme outre-mer. Notre pays aime protéger ses monuments et ses oeuvres artistiques. Il a mis en place des structures administratives, formé et recruté des fonctionnaires pour cela. Il doit porter la même attention à son patrimoine linguistique et à sa diversité culturelle. Cela relève de son devoir. Il est comptable de la vie de ces langues sur son territoire. Pourtant, la France a pris beaucoup de retard. Il a la responsabilité de les sauvegarder, de les transmettre, de les développer. Ne rien faire serait choisir leur disparition, au moins leur effacement. Cette disposition serait contraire à de nombreux textes internationaux.

Notre pays s’est engagé dans un double mouvement qui secoue l’Etat-nation lui-même : la construction de l’union européenne depuis la seconde guerre mondiale, la décentralisation depuis 1982. Ce choix, mûri, délibéré, confirmé par le peuple en 1992 pour l’Europe, adopté par le Parlement en 1982 pour la décentralisation, implique des conséquences dans le domaine qui nous concerne.

Un Conseil Général qui cesse d’être dirigé par le Préfet, un Conseil Régional élu au suffrage universel aujourd’hui dans le cadre départemental, demain dans le cadre régional, peuvent vouloir le respect d’abord, le développement ensuite, d’une langue parlée par la population, par des électeurs, sur son territoire. Il ne faut pas s’étonner de cette montée de la demande linguistique et culturelle. Beaucoup de collectivités territoriales ont déjà engagé des politiques en ce sens. Cela n’empêche pas de reconnaître qu’il faut disposer d’une grande langue internationale. C’est la langue française qui, pour nous, remplit cette fonction. Il n’y a aucune contradiction entre les deux.

Devenant de plus en plus européen, comment s’étonner qu’un français, vivant près d’une frontière, ne soit pas encouragé à parler sa langue régionale si elle lui permet de trouver un travail dans le pays voisin, d’y nouer ou renouer des amitiés, de s’y promener ou d’y acheter ? L’exemple de l’Espagne est frappant pour cela : personne ne s’y référait tant que la dictature franquiste étouffait les libertés. Dès que la démocratie s’est installée, dès qu’elle a rejoint l’Union Européenne en 1985, l’organisation administrative et territoriale en provinces autonomes du pays s’est vue comparée avec celle de notre France centralisée : Basques et Catalans ne s’y sont pas trompés.

J’ajoute un dernier trait qui touche la vie politique, économique et sociale depuis 25 ans, depuis le début de la " crise " : l’Etat lui-même a souvent affirmé qu’une des réponses est à trouver dans le développement local, dans la démocratie de proximité. Un slogan a longtemps connu le succès : " Vivre, décider, travailler au pays ". De la même façon, le thème de l’environnement ne se comprend qu’au regard de cet ancrage local. Cette valorisation du " local " et de la proximité réveillait forcément et encourageait la revendication régionale.

Le moment est donc venu de bâtir une politique cohérente et suivie en matière de langues et cultures régionales. Les militants, les acteurs, les passionnés de cette cause l’attendent.

La langue française n’en souffrira pas et ne doit pas en souffrir.

La promotion d’une langue régionale ne peut pas signifier la régression de la langue parlée par tous. Le français est bien installé, bien ancré sur le territoire de la République. Il n’est pas menacé. Son problème est sa place dans le monde, dans les instances internationales et même européennes, dans les rencontres des chercheurs, les échanges intellectuels et artistiques, les relations industrielles, commerciales et financières. Une politique hardie pour les langues et cultures régionales mérite d’être accompagnée par un grand projet pour la francophonie. Dans le grand concert de la mondialisation de l’économie, de la circulation des hommes, des biens et de l’argent, de la progression vertigineuse des sites internet, méfions-nous que notre langue française ne devienne une langue " régionale " à l’échelle planétaire. Langue française et langues régionales sont des langues amies à l’intérieur et alliées à l’extérieur pour le rayonnement de la France. La culture française n’est pas que la culture de langue française. Le " cheval d’orgueil " de Pierre-Jakès Hélias a été traduit dans de nombreuses langues dans le monde entier. Le prix Nobel de Frédéric Mistral en 1904 a rejailli sur le pays tout entier. En cette année 1998, la journée de la culture française à l’exposition universelle de Lisbonne a fait une large place aux spectacles en langues régionales. Tout cela, c’est la France dans ce qu’elle a d’énergie créatrice et de rayonnement universel.

La République non plus n’est pas menacée. Si elle l’est, il faut alors regarder vers des mouvements politiques plutôt que vers les mouvements linguistiques. Ne laissons pas aux premiers, dès lors qu’ils sont extrémistes, la possibilité de promouvoir une identité régionale qui serait ethnique, repliée et fermée aux autres, selon le même schéma prôné pour l’identité nationale. Ne vivons pas la présence d’une langue régionale comme une atteinte à la souveraineté : à un moment où la France accepte d’abandonner sa monnaie, elle peut accepter le breton ou le catalan... sans craindre de perdre son unité linguistique.

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Les déclarations ne manquent d’ailleurs pas depuis quelques dizaines d’années. Elles ont montré d’importantes évolutions dans les esprits et conduit à des décisions et à des mesures qui ont déjà changé les choses.

 

François Mitterrand, le 14 mars 1981 à Lorient, annonçait son choix :

" Le temps est venu d’un statut des langues et cultures de France qui leur reconnaisse une existence réelle. Le temps est venu de leur ouvrir grandes les portes de l’école, de la radio et de la télévision permettant leur diffusion, de leur accorder toute la place qu’elles méritent dans la vie publique ".

A cette déclaration, il ajoutait son souhait que la France cesse d’être

le dernier pays d’Europe à refuser à ses composantes les droits culturels élémentaires, reconnus dans les conventions internationales qu’elle a elle-même signées ".

Deux mois plus tard, il devenait Président de la République.

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Jacques Chirac, le 29 mai 1996 à Quimper, lors de son premier voyage officiel en Bretagne comme Président de la République, se déclare ouvert à la signature par la France de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires adoptée par le Conseil de l’Europe à Strasbourg le 24 juin 1992 et ouverte à la signature le 5 novembre 1992.

Cette déclaration a été faite au dîner officiel qui rassemblait autour du Président les 12 parlementaires du département, le préfet du Finistère, le secrétaire général adjoint de l’Elysée et le maire de Quimper. La presse s’est largement fait l’écho de cette déclaration.

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Lionel Jospin, Premier Ministre, dans son discours au sommet du Conseil de l’Europe en octobre 1997 a évoqué

" la 3ème dimension à laquelle aucun Européen ne saurait rester insensible : la dimension linguistique et culturelle. A cet égard, une longue tradition existe : celle qui a vu le Conseil de l’Europe développer une politique de l’éducation et de la culture, créer des structures à cet effet, lancer des campagnes de préservation et de mise en valeur du patrimoine européen.

Plus que jamais, en cette fin du XXème siècle qui voit se développer la mondialisation des échanges et la globalisation de l’économie, l’Europe a besoin d’affirmer son identité qui est faite de la diversité de son patrimoine linguistique et culturel. A cet égard, les langues et cultures régionales méritent, de notre part, une attention particulière : nous devons les préserver et les faire vivre. Cette prise de conscience va de pair, à l’aube du troisième millénaire, avec la maîtrise des nouvelles technologies de l’information qui doivent respecter la diversité de nos langues et de nos cultures mais aussi contribuer à la propagation de nos valeurs communes : éducation, démocratie, progrès social ".

Inaugurant à Nouméa, le 4 mai 1998, le centre culturel Tjibaou, les premiers mots du discours du Premier Ministre ont été les suivants :

Toute culture porte en elle une part de singularité et une part d’universel. Ses traditions, ses références, ses pratiques sont singulières. Elle témoigne du peuple qui la porte et de son histoire. La connaissance profonde d’une culture permet de saisir la dimension d’universalité qui s’attache à elle.

Jean-Marie Tjibaou nous transmet une double leçon. Il nous enseigne que tout combat politique a une dimension culturelle. C’est le sentiment de la négation de l’identité culturelle Kanak qui est à l’origine de sa révolte ".

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Claude Allègre, Ministre de l’Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie, a publié dans le numéro 4 du bulletin mensuel d’information de l’Institut Occitan un article où il développe sa pensée :

" Donner toute leur place aux langues régionales... cela signifie donner aux enfants et aux jeunes qui le souhaitent la possibilité de garder un contact vivant avec une langue et sa culture... il faut aller de l’avant et ouvrir l’école à la diversité des régions et des cultures... Il faut que l’école de la République accepte la diversité et donne aux enfants la fierté et la connaissance de l’Occitanie ".

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Enfin, parmi les projets de loi en préparation par le Gouvernement, celui sur l’aménagement du territoire prévoit que seront élaborés des schémas de services collectifs. L’un d’entre eux sera consacré à la culture. L’article qui l’institue comporte l’alinéa suivant : " le schéma de services collectifs culturels assure la promotion des cultures et des langues régionales ". On peut penser que le Parlement accepterait cette rédaction si elle lui est soumise en ces termes.

 

C ) Les évolutions législatives et réglementaires

 

Depuis la seconde guerre mondiale quelques textes ont déjà montré la voie.

Une loi à l’initiative du député du Tarn, Joseph Deixonne, a été votée et promulguée le 11 janvier 1951. C’est le seul texte dont le Parlement ait eu à débattre. La loi Haby de 1976 a élargi ses possibilités sans en modifier la structure.

La loi Jospin du 10 juillet 1989 comporte l’article suivant : " la formation donnée par l’Education Nationale peut comprendre un enseignement des langues et cultures régionales ".

Beaucoup de circulaires ont été publiées. Trois ont marqué par leur importance et leur ampleur :

  • celles d’Alain Savary du 21 juin 1982, intitulée " l’enseignement des cultures et langues régionales dans le service public de l’Education Nationale ", et du 30 décembre 1983, intitulée " texte d’orientation sur l’enseignement des cultures et langues régionales ".
  • celle de François Bayrou du 7 avril 1995, intitulée " enseignement des langues et cultures régionales ".

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Joseph Deixonne, René Haby, Alain Savary, Lionel Jospin, François Bayrou : il y a une géographie des textes ministériels. Sur ces cinq ministres, quatre sont des élus du Sud-Ouest, de l’occitanie : Tarn, Haute Garonne, Pyrénées Atlantiques. René Haby, quant à lui, au moment de sa loi, n’était pas encore un élu du suffrage universel.

Il faut ajouter à cela l’impressionnante série de propositions de loi déposées sur le bureau des Assemblées depuis la dernière guerre : on les compte par dizaines. Aucune n’est venue en discussion.

Ce grand nombre de propositions inabouties, cette absence de discussion parlementaire entraînent un sentiment de désintérêt, voire d’abandon de la part des responsables politiques. Il peut pousser à des radicalisations, donner le sentiment que l’Etat cherche à biaiser ou à gagner du temps. Je crois qu’il est temps de sortir de l’hypocrisie et de ce petit jeu du chat et de la souris.

Au passage, j’ai recensé neuf membres du gouvernement actuel signataires de ces propositions. Ces neuf membres appartiennent aujourd’hui à trois formations politiques différentes.

Ce rapport que vous avez demandé, à Nicole Péry puis à moi-même, est le premier voulu par un Premier Ministre. Il n’est pas sûr qu’il satisfasse tous les défenseurs des langues et cultures régionales dans leur diversité ni les réticents ou les opposants à cette cause. Ceux qui craignent pour la langue française et l’unité nationale méritent aussi d’être entendus et écoutés. Mais chacun peut faire un pas vers l’autre. Personne n’a à craindre l’autre, dans ses intentions ou dans ses convictions. Tous attendent une clarification indispensable.

Il est possible aujourd’hui de faire le choix du régionalisme républicain plutôt que de voir renaître ou se développer des nationalismes régionaux.

Erik Orsenna, de l’Académie française, devant les élèves d’un lycée à Quimper a eu cette belle phrase : " la diversité est un cadeau du monde ". Anne-Marie Thiesse, chercheur au CNRS, a donné le titre suivant au chapitre premier de son livre intitulé " Ils apprenaient la France, l’exaltation des régions dans le discours patriotique ": " La France est variété dans l’unité ". C’est dans cet esprit qu’il faut aborder cette question. Le XXIème siècle aura à gérer la revendication identitaire. Les républicains doivent le faire. Sinon d’autres s’en chargeront.

Les conditions sont réunies pour que le Gouvernement s’engage dans cette voie.

 

La République française a eu raison de façonner une conscience nationale. Pour cela elle a résisté au cléricalisme ; elle s’est opposée au séparatisme ; elle a fait reculer le nationalisme ; elle a survécu aux agressions extérieures ; elle est revenue avec la Résistance et la victoire de 1945.

Aujourd’hui, elle est là, bien installée même si elle exige une permanente éducation auprès des nouvelles générations, solide même si le retour arrogant de forces hostiles cherche à l’atteindre, à l’affaiblir et à la remettre en cause.

Aucune langue, aucune culture régionale n’est en mesure ni ne veut lui porter préjudice ou renoncer à ses principes. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, plusieurs aspects et conflits de notre histoire trouvent une issue ou une solution. Comme si la France tournait des pages de son livre d’histoire.

La question coloniale est réglée. Elle se rappelle encore à nous à travers les accords de Nouméa de 1998 après les accords Matignon de 1988. Les Français applaudissent.

La question scolaire a trouvé son apaisement après deux convulsions dans les deux camps : 1984 à Versailles pour l’enseignement privé catholique ; 1994 à Paris pour l’enseignement public laïc. Les Français approuvent cet équilibre obtenu.

La question allemande ou franco-allemande est réglée. Depuis le premier affrontement entre Charles Quint et François 1er et jusqu’à 1945, il y a eu 23 conflits guerriers franco-allemands. Le traité de l’Elysée de 1963 entre nos deux pays, l’Union européenne ont mis un terme à cette longue série. Les Français approuvent cette paix assurée.

La question cléricale ne se pose pas. La société, l’Etat sont laïcs même s’il faut être toujours vigilant pour qu’ils le restent et s’opposer à tous les intégrismes. Dans notre pays, la menace n’est pas apparente ou imminente. Les Français sont attachés à cet esprit de tolérance.

La question de l’Etat trouve un nouvel équilibre. Il est moins propriétaire de moyens de production et d’échange. Il s’est engagé dans la double voie de la décentralisation et de la déconcentration. Les Girondins et les Jacobins se disputent moins qu’ils ne se complètent. Les Français apprécient cette évolution.

La question de notre diversité linguistique est à inscrire dans cette série. Elle a fait couler moins de sang et mis moins de manifestants dans la rue. Elle est un reliquat de notre longue marche vers l’unité nationale et l’installation de la République.

A la fin du XXème siècle, elle attend une reconnaissance au plus haut niveau. Le moment est venu de le faire.

 

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[Lista deus numeròs]
© 1997, 1998 Justin Lapujolada