Lo Hialat
 

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[Lo Hialat]

No. 2
Setémer de 1998

Actualitats

Lo rapport Poignant

Demandat peu purmè ministre francés a Nicole Péry, puish hidat au màger de Kemper, En Poignant, ací lo repòrt Poignant.

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IV - CULTURE ET MEDIAS : constats

 

Le principe c’est la liberté, de création, d’expression, de diffusion. Dans le respect de la loi qui condamne racisme, xénophobie, antisémitisme.

La référence, c’est la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789, dans son article XI :

" La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement ; sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi  ".

Ce principe se traduit par une application simple : aucune censure préalable, aucune sanction a posteriori sauf les cas prévus par la loi. A plus forte raison, le mode d’expression est libre, et notamment l’usage de la langue. Parce que cette expression s’exerce librement, elle ne peut subir ni entraves, ni contraintes.

Dans les régions de France, écrivains, musiciens, artistes, chercheurs,... ont toujours produit des oeuvres et rayonné pour certains dans tout le pays et au-delà.

Beaucoup de remarques m’ont été faites sur le manque de moyens accordés par les pouvoirs publics pour faire vivre cette liberté. Pourtant depuis le début des années 80, le Ministère de la Culture a insufflé de considérables encouragements à toute la diversité culturelle du pays.

Aujourd’hui, il y a un véritable regain de succès populaire pour toutes les expressions culturelles. C’est vrai en Alsace pour les spectacles vivants, en Corse pour le chant polyphonique, en Pays Basque pour les " muxikos ", danses collectives sur les places publiques. C’est vrai du théâtre de langue occitane ou de la musique, de la danse, de l’édition en Bretagne. Des milliers de jeunes se retrouvent autour d’expressions musicales qui ont su générer des formes culturelles plus contemporaines, inspirées notamment du rock. Partout des livres pour enfants sont édités à des fins pédagogiques et ludiques.

Des structures existent qui rassemblent, encouragent, valorisent ces expressions culturelles. Elles ne sont pas identiques d’une région à l’autre :

  • La Corse a un statut particulier.
  • Pour le Pays Basque ont été mis en place l’Institut culturel basque et l’Académie de langue basque, seul exemple en France.

- L’Institut culturel basque est un organisme créé par le ministère de la culture et co-financé par l’Etat. Il rassemble des associations et les 145 communes du Pays Basque regroupées au sein d’un syndicat intercommunal de soutien à la culture basque.

- L’Académie de la langue basque est reconnue en Espagne par un décret royal du 26.02.76 et dans la Communauté Autonome Basque par le statut d’autonomie du 18.12.78. En France, c’est un établissement reconnu d’utilité publique par le décret du 20.02.95.

Les travaux de l’Académie ont trait à la lexicographie, à la grammaire, à la dialectologie, à la littérature. Les deux grands projets en cours concernent d’une part l’élaboration d’un dictionnaire général basque et d’autre part un atlas linguistique.

  • Il existe un Institut d’études occitanes, association nationale déclarée d’utilité publique.
  • En Bretagne ont été institués un Conseil culturel et un Institut culturel.

- Le Conseil culturel de Bretagne a été créé en 1978 par la charte culturelle de Bretagne " octroyée " en 1977. Son préambule se voulait " un acte de reconnaissance de la personnalité culturelle de la Bretagne " et prenait " l’engagement d’en garantir le libre épanouissement ". Composé de représentants des collectivités locales, le conseil est vraiment l’organe du mouvement culturel breton.

- L’Institut culturel de Bretagne a été créé en 1981 par le Conseil Régional, avec la participation du Conseil Général de Loire Atlantique. Il a pour objet de soutenir le développement et la diffusion de la culture bretonne. Il est composé de 16 sections recouvrant les différents domaines, des sports et jeux à l’anthropologie médicale en passant par la littérature écrite et la religion. Il dispose d’un service de la langue bretonne utilisé comme service d’aide aux collectivités locales.

  • En Alsace, il existe une Agence culturelle d’Alsace.

Ces exemples ne sont pas un recensement exhaustif de tout ce qui existe. Ils montrent la vitalité de ce qui se fait.

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Radios et télévision de service public ont déjà leur place dans la diffusion des diverses expressions culturelles.

  • Dans son cahier des charges, à son article 6, Radio-France doit " veiller à la contribution des langues et cultures régionales ". Ses radios locales décentralisées ont vocation à s’ancrer sur leurs territoires d’audience, à jouer la carte de la proximité et à faire de la vie culturelle un atout majeur de leur rayonnement.

Elles le font selon différentes méthodes : soit en mélangeant en permanence les deux langues comme en Corse ; soit en alternant les deux langues, les émissions en langue régionale étant arrêtées à des heures régulières, comme en Bretagne ou au Pays Basque ; soit en juxtaposant les radios, l’une étant réservée à une langue, donc à une fréquence comme en Alsace (en accord avec Radio Bleue).

  • De son côté, France 3, dans son cahier des charges, par son article 16, a vocation à faire vivre les langues et cultures régionales. Elle a apporté des solutions différentes selon les régions, selon le niveau de pratique de la langue et des traditions culturelles.

Des difficultés autres que budgétaires peuvent apparaître. C’est le cas pour les régions et départements concernés par l’occitan. Le territoire est très vaste ; les populations concernées par la langue sont diversement réparties et concentrées.

Cette situation ne facilite pas la réponse à la demande. Et dans tous les cas, il faut des journalistes et des animateurs bilingues bien formés pour préparer et mener des émissions.

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Enfin, plusieurs sites Internet ont été ouverts ces dernières années pour le breton, le basque, l’occitan,...

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La République, la Nation, ne peuvent que s’enrichir de cette diversité culturelle. Anne-Marie Thiesse l’affirme en introduction à son livre " Ils apprenaient la France " fruit de ses travaux de recherche sur la IIIème République :

" Contrairement à une opinion fort répandue sur cette période, la célébration de l’identité française ne s’est pas effectuée par une dénégation des identités locales, tout au contraire... L’école primaire républicaine, qui a parfois été dépeinte comme le théâtre d’un combat sans merci mené par des jacobins acharnés contre les cultures régionales, a tout au contraire cultivé le sentiment d’appartenance locale comme propédeutique indispensable au sentiment d’appartenance nationale ".

Sans multiplier les exemples, mais pour illustrer cette thèse et décrisper cette tension ou incompréhension franco-française, voici un extrait de la circulaire adressée en 1911 par le Ministre de l’instruction publique, Maurice Faure, aux Recteurs d’Académie pour les inciter à faire enseigner l’histoire et la géographie :

" C’est un fait malheureusement trop certain que la plupart des élèves et un trop grand nombre de Français ignorent presque entièrement tout ce qui a trait à la géographie et à l’histoire de la commune, du département où ils sont nés et de l’ancienne province dont ce département faisait partie avant la Révolution. Il y aurait cependant le plus sérieux avantage à ce que tous connussent bien la physionomie particulière de la terre natale, ses ressources, les coutumes et les moeurs de ses habitants, leurs traditions, contes, proverbes, légendes, le rôle qu’elle a joué dans le passé, les citoyens éminents qu’elle a enfantés. (...)

On est d’autant plus attaché à son pays qu’on a de plus nombreuses raisons de l’aimer, de s’y sentir en quelque sorte solidaire des générations disparues, et l’amour du sol natal, comme je le disais à la Chambre des Députés, est le plus solide fondement de l’amour de la patrie ".

A l’époque, on parle de la petite patrie, sorte de premier amour avant celui de la grande patrie. L’une n’est pas l’adversaire de l’autre.

Là encore, il faut revenir aux sources de la tradition républicaine avec ce double enseignement :

  • Toute culture est ouverte. La limiter à ceux qui maîtrisent sa langue d’expression serait en réduire la portée. C’est bien de connaître la langue. C’est utile si on veut entrer plus intimement dans la connaissance d’une région. La connaissance des noms de lieux et de personnes est déjà une première approche. Ce n’est cependant pas une condition pour approcher les expressions culturelles. La littérature bretonne, comme la littérature russe ou anglaise, peut être connue grâce à de bons traducteurs en langue française. C’est vrai aussi pour la culture française. Elle s’approche dans les autres langues. Quand un film ou un livre en langue française est doublé ou traduit dans une autre langue, c’est toute notre culture qui rayonne. Toute autre approche exclurait, rejetterait ceux qui, venant d’ailleurs, choisissent de vivre dans telle région. Il n’y a pas plus de bretons, de catalans, de corses " de souche ". Le droit du sang ne doit pas plus exister dans nos régions que dans la Nation. Ou alors, la culture devient ethnique. Une culture régionale se construit aussi par apport des autres, par brassage, par mélange. Au XXIème siècle se posera toujours la question " d’où je viens ? ", mais aussi celle qui l’accompagne : " Où je veux être ? ". De la rencontre entre l’origine et la volonté, le hasard et le choix, doivent naître des oeuvres fécondes appelées à l’universalité. En même temps, nous ne pouvons pas nous contenter d’un universalisme abstrait. Les groupes humains sont vivants, installés quelque part, parlant une ou plusieurs langues, ayant une histoire et des repères pour vivre ensemble. Oublier cela, c’est amputer chacun d’entre nous.
  • Toute culture est vivante. Elle ne peut rester figée sur telle ou telle période de l’histoire. Elle doit faire connaître le passé, elle ne peut pas rester fixée sur lui. Le patrimoine, les traditions populaires, le travail muséographique sont des pans essentiels de l’expression culturelle. Mais une part importante doit être réservée à la création contemporaine, par les hommes et les femmes d’aujourd’hui, qu’ils s’expriment en langue française, en leur langue régionale ou dans les deux.

 

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[Lista deus numeròs]
© 1997, 1998 Justin Lapujolada